Offshore au Maroc : un décollage freiné par la pénurie de compétences
L’arrivée des SSII occidentales, attirées par les mesures incitatives du gouvernement, a abouti à une certaine tension sur les compétences IT dans le Royaume. D’autant que le gouvernement avait au départ misé ses efforts de formation sur le BPO, créneau qui peine encore à décoller.
Inflation des salaires, manque de profils IT, difficulté à trouver sur place des compétences. Les avis des personnes que nous avons interrogées lors d’un reportage d’une semaine au Maroc convergent : le décollage du Royaume dans l’offshore ne s’est pas déroulé sans accroc. En cause d’abord, des ressources humaines disponibles en nombre relativement limité. D’où une bousculade des recruteurs que n’a fait qu’aggraver l’arrivée sur place de nombreuses SSII occidentales, attirées par les mesures incitatives mises en place par le gouvernement marocain.
A la clef, une certaine envolée des salaires, notamment sur les profils d’ingénieurs IT. Si le salaire d’un technicien spécialisé se négocie autour de 4 000 dirhams par mois (350 euros), celui d’un ingénieur débutant atteint entre 10 000 et 12 000 dirhams (entre 890 et 1 070 euros). Une rémunération qui peut doubler en trois ou quatre ans. « La flambée des salaires s’est calmée dans les centres d’appel, explique Amine Zniber, directeur régional de l’école Supinfo au Maroc. Mais elle s’est déportée vers les profils IT du fait de l’arrivée sur place des SSII étrangères ».
Erreur d’aiguillage
Si l’envolée des salaires profite bien sûr aux salariés du secteur, elle met en péril le décollage de l’offshore au Maroc qui repose, avant tout, sur l’installation sur place des grandes SSII. Or, si l’inflation des salaires se poursuit, ces dernières pourraient être tentées de se tourner vers des pays moins chers. Bien sûr, le gouvernement marocain a mis en place un programme visant à doper le nombre d’ingénieurs formés chaque année (objectif : 15 000 profils par an en 2013), via notamment l’installation d’écoles comme Supinfo, tout en fournissant aux employeurs des moyens pour adapter les profils disponibles (via des participations aux frais de formation).
Mais cet effort mettra encore quelques années à produire ses fruits. D’autant que le gouvernement marocain avait plutôt misé, au départ, sur le développement du BPO (Business Process Outsourcing), plutôt que sur l’offshore informatique. Comme l’expliquait dans un entretien dans nos colonnes le ministre marocain de l’Industrie, du Commerce et des Nouvelles Technologies, Ahmed Reda Chami : « notre anticipation de départ nous a conduit à former plus de profils BPO que de profils ITO (IT Outsourcing, ndlr). Nous avons donc lancé une opération de rattrapage, ForShore 3000, visant à requalifier 3 000 personnes sur les métiers de l’ITO en six à neuf mois. » S’y ajoute le manque de profils aguerris, segment où Isabelle Reydet-Rousselet, gérante de CMC2, société de conseil et de communication installée à Casablanca, note une « véritable pénurie », même si un certain nombre de sociétés tentent de combler ce manque en faisant revenir aux pays des MRE, acronyme très employé dans le Royaume et désignant les Marocains résidant à l’étranger. Un filon qu’a par exemple exploité l’Indien TCS pour diriger sa filiale installée à Casanearshore, la zone dédiée à l’offshoring installée en banlieue de la capitale économique.
Source : http://www.lemagit.fr/article/../offshore-maroc-decollage-freine-par-penurie-competences/