On se battra pour le capital humain

A l’instar de la mobilité caractérisant aujourd’hui les capitaux matériel et financier, la formation des hommes, décideurs, cadres et chercheurs, s’inscrit à son tour de plus en plus rapidement dans une logique analogue. Attirer du potentiel intellectuel ou lutter contre l’émigration des jeunes qualifiés devient ainsi une nécessité économique pour nombre de régions dans le monde d’aujourd’hui.

Tout dans les écoles

A long terme les gagnants de cette nouvelle compétition discrète, voire masquée, seront les pays disposant d’institutions d’enseignement répondant au standard international. Elles vantent le nombre, l’effectif de leurs étudiants, les formations dispensées, leurs campus pour étudiants, en offrant des diplômes mondialement reconnus et en utilisant, quelle que soit la région, l’anglais qui s’est imposé comme langue des affaires, de la recherche et de la technologie. Actuellement, les USA demeurent encore le leader incontesté en occupant les 50 premières places dans le palmarès des universités dans le monde, nonobstant les évènements de septembre 2001 à New York.
Une baisse de 8% du flux d’étudiants suite aux restrictions faites aux étrangers avait été enregistrée au cours de la dernière période. Récemment les Américains ont réalisé l’importance également financière de la niche étudiants étrangers, estimée à quelque 14 milliards de dollars. Ils ont fait le choix de consolider la place de l’université Américaine sur le marché de la formation.
L’enseignement supérieur tend à structurer une sorte de monde multipolaire. Selon le dernier rapport du Conseil américain de l’Education, ce sont près de 2,5 millions d’étudiants étrangers que certaines universités cherchent à attirer.
La part revenant aux universités américaines serait passée du quart au cinquième à la fin de l’année 2004. Pour se rendre compte de l’intensité de la concurrence interuniversitaire, rappelons le fameux classement du London’s Time Higher Education et la controversée liste du Shanghai Jiatong. Ces travaux ont révélé que parmi les dix premières universités du monde, 8 étaient américaines et 2 basées en Angleterre. Mais l’élément nouveau est que sur les 200 universités classées en 2007 et intéressant quelque trente pays, celles de Pékin, de Singapour et de Tokyo figurent au nombre des 20 premières.
La tendance est de plus en plus à des formations et à l’implantation de structures en international. C’est le cas par exemple de treize écoles supérieures privées indiennes ayant établi des liens avec des universités étrangères.
La moitié des institutions d’enseignement supérieur du Royaume-Uni sont présentes en Chine notamment. L’Ensead (Paris) est actif à Singapour et à Tsinghua (Chine). Les universités du Massachusetts (USA), l’université de Chicago ou celle de Cornell ne manquent pas à l’appel sur le campus de Singapour. Avoir une présence à l’extérieur est devenue une nécessité.
Les grands pays exportateurs d’étudiants étrangers comme les pays asiatiques sont devenus d’importants investisseurs en éducation chez eux pour limiter la fuite des cerveaux.
Ainsi, la Chine projette de porter prochainement la dotation consacrée à l’enseignement supérieur de 0,5% à 4% du PNB! La Malaisie pourrait devenir une sorte de plaque tournante universitaire internationale, un ‘hub’ accueillant actuellement près de cent mille étudiants étrangers, et le double dans quelques années! Dans la plupart des pays asiatiques les enseignements dans le supérieur sont de plus en plus dispensés en langue anglaise, favorisant en particulier les universités des USA et celles de la Grande-Bretagne. Dans le même ordre d’idées, en vue d’exercer une attraction sur les professeurs qui font la réputation des établissements, les écoles supérieures de Singapour par exemple versent des salaires du même niveau qu’aux USA, soit quelque 180.000 dollars par an (1,5 million de DH!)
En attendant, l’Afrique, le Proche-Orient donnent encore l’impression de ne pas être concernés par ce mouvement de fonds mondial.

Source : leconomiste.com – Par le Pr Mohammed GERMOUNIÂ

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