Recrutement hostile : Comment s’en protéger
Recruter pour nuire à ses concurrents, c’est le principe du recrutement hostile. Une pratique qui se développe et dont il faut apprendre à se protéger
Le recrutement devient hostile quand il porte atteinte à la capacité créative ou commerciale d’une entreprise concurrente, en termes de produit ou de talent. Il se distingue très clairement des pratiques de recrutement habituelles dans lesquelles le recruteur identifie un besoin interne en compétences dans son organisation, suite à un départ, une croissance ou une restructuration. Le recruteur hostile ne s’embarrassera pas d’avoir un emploi à occuper. Il sera plus concerné par un concurrent venant de déposer un brevet, de gagner un contrat important ou de grignoter ses parts de marché.
Si dans « guerre des talents » il y a bien le mot « guerre », cette pratique n’est pas toujours de « bonne guerre ». Les moyens utilisés pouvant être la peur (la rumeur d’un plan social), l’ambition (un poste aux responsabilités plus importantes), l’argent (moyen le plus utilisé) ou les sentiments (on utilise une nouvelle recrue en lui demandant de parler de sa nouvelle entreprise à ses anciens collègues).
En résumé, le recruteur hostile cherchera à capter les talents de ses concurrents, souvent de plus petites entreprises, en les utilisant comme vivier ou « nurserie ».
L’outil du recrutement hostile
Le principal outil de travail du recruteur hostile est l’organigramme. La plupart du temps, il dispose d’informations plus à jour que celles que l’entreprise visée utilise. Cet organigramme n’est pas si difficile à trouver, car il est rarement classifié comme document sensible. Il est parfois tout simplement en libre accès sur le site Internet de l’entreprise. A partir de cette liste de noms, le recruteur déterminera quels sont les salariés les plus compétents, les plus démotivés ou les plus créatifs afin de savoir qui approcher en priorité. Les professionnels RH et aux managers doivent prendre en compte l' »approchabilité » de leurs collaborateurs : quel est le risque qu’ils soient approchés par le recruteur d’une entreprise concurrente ?
Pour approfondir sa connaissance de l’organisation et distinguer les talents sur lesquels l’entreprise se repose, le recruteur hostile utilisera plusieurs moyens. Pour commencer, il effectuera une recherche par nom d’entreprise dans les sites de mise en relation. Il obtiendra ainsi des noms qu’il contactera ou auxquels il transmettra une annonce ciblée. Ce stratagème les attirera en entretien, dont l’objectif ne sera en réalité pas de leur proposer un poste, mais uniquement d’obtenir des informations (d’autres moyens existent).
Aujourd’hui, la sécurité n’est donc plus l’apanage des procédés de fabrication ou de la R&D : on peut désormais parler de « sécurité des talents ».
Comment s’en protéger
Pour se prémunir de ce type d’attaque, trois niveaux de protection existent.
Passif : La marque d’employeur. A l’aide du marketing, l’entreprise se positionne en tant qu’employeur différent de ses concurrents. L’activité de l’entreprise est mise en musique sur son site Internet, la présentation des emplois mise en scène par ses salariés et ses offres d’emploi mises en valeur sur les sites de recrutement en ligne. A noter que cette marque, qui est une promesse faite par un employeur à ses candidats, n’est pas une construction artificielle ou une simple perception de l’entreprise idéalisée : c’est la représentation de ce que vivent chaque jour les salariés dans cette entreprise. Dans le cadre du recrutement hostile, cette marque d’employeur, appuyée par des pratiques d’employeur de référence, permettra d’améliorer la fidélisation de ses salariés et l’attraction de nouveaux talents.
Défensif : Les stratégies de blocage. Elles sont mises en place en interne et s’appuient sur les bonnes pratiques de l’entreprise.
- La première est la mise en place d’une politique de sécurité : contrôle de la diffusion de l’organigramme, utilisation des notions de « risque de départ » et d' »approchabilité » des salariés.
- La seconde repose sur la rémunération : l’entreprise vérifie que sa grille des salaires est dans la bonne moyenne par rapport à ses concurrents.
- Une troisième stratégie s’appuie sur une communication transparente : la deuxième raison de départ des salariés lors de leurs six premiers mois dans l’entreprise est leur mésentente avec l’encadrement.
- Quatrième axe, l’implication de la direction : la participation du PDG dans le processus de recrutement est en effet un facteur « fidélisant ».
- Une cinquième possibilité est de recourir à des primes d’approche : elles sont octroyées aux salariés qui reçoivent l’appel d’un recruteur.
- Enfin, de plus en plus utilisée, la cooptation est aussi un excellent moyen de blocage du recrutement hostile.
Offensif : Le recrutement guérilla. Les petites entreprises aussi peuvent agir et chercher à rendre la monnaie de leur pièce aux grandes entreprises qui misent uniquement sur l’argent pour pêcher leurs talents. La PME mettra en valeur des pratiques de management qui manquent à ses concurrents : suivi d’un dossier de A à Z, reconnaissance accrue, participation aux résultats de son travail, meilleur équilibre vie privée / vie professionnelle, participation aux décisions stratégiques le concernant, etc. En interne, elle pourra aussi utiliser les salariés qui par le passé ont travaillé pour les entreprises concurrentes et ont choisi de partir.
Ces pratiques internes seront soutenues par un recrutement agressif (mais non hostile) sur les terres de ses concurrents. Les moyens les plus courants étant une campagne d’affichage à proximité du siège du concurrent, l’organisation de séminaires gratuits ou de petits déjeuners, etc.
Source : JDN Management